Vous avez beau lire des articles financiers, comparer les placements et suivre les tendances du marché, certaines décisions que vous prenez avec la plus grande conviction sont peut-être en train de nuire à votre épargne. Pourquoi ? Parce que notre cerveau est programmé pour nous jouer des tours.

La finance comportementale a mis en évidence de nombreux biais cognitifs qui influencent nos choix en matière d’investissement. Ces automatismes de pensée nous poussent à prendre de mauvaises décisions, non pas par manque d’information, mais à cause de filtres mentaux inconscients qui altèrent notre jugement.

De la peur irrationnelle de perdre de l’argent à l’excès de confiance en nos capacités, ces biais sont omniprésents et peuvent saboter nos placements… sans même que nous nous en rendions compte !

L’aversion à la perte : la peur de perdre plus forte que l’envie de gagner

Imaginez : vous avez investi dans une action qui a perdu 15 % de sa valeur en quelques semaines. Vous pourriez vendre maintenant et limiter la casse… mais vous vous dites qu’il vaut mieux attendre que ça remonte. Après tout, ce n’est qu’une perte « sur le papier », et vendre acterait définitivement cet échec. Alors vous patientez, quitte à voir la valeur de votre action plonger encore plus bas.

Bienvenue dans le piège de l’aversion à la perte. Ce biais cognitif, mis en évidence par les psychologues Daniel Kahneman et Amos Tversky, démontre que nous ressentons la douleur d’une perte bien plus intensément que la satisfaction d’un gain équivalent. Autrement dit, perdre 100 € nous affecte davantage que gagner 100 €.

Les conséquences sur votre épargne :

  • Vous gardez trop longtemps des investissements déficitaires au lieu de couper les pertes rapidement.
  • Vous privilégiez des placements peu risqués, voire non rentables, par peur de perdre, même si des alternatives plus performantes existent.
  • Vous hésitez à investir en période de crise, alors que c’est parfois le meilleur moment pour acheter à prix bas.

Comment éviter ce biais ?

Adopter une approche rationnelle : définissez des règles claires avant d’investir, par exemple en fixant un seuil de perte au-delà duquel vous vendez sans hésiter. Ne laissez pas vos émotions dicter vos décisions financières.

Le biais de confirmation : entendre ce que l’on veut bien entendre

Vous êtes convaincu que l’immobilier est le seul placement sûr. Alors, chaque fois que vous tombez sur un article allant dans ce sens, vous le lisez avec attention. En revanche, si un économiste explique que le marché immobilier risque de ralentir, vous trouvez tout un tas d’arguments pour considérer son analyse non pertinente.

C’est exactement ce que l’on appelle le biais de confirmation : nous avons tendance à rechercher et à accorder plus d’importance aux informations qui confirment nos croyances, tout en minimisant, voire en ignorant, celles qui les contredisent.

Pourquoi c’est un problème ?

  • Vous prenez des décisions biaisées en ne vous basant que sur des informations qui vous arrangent.
  • Vous risquez de vous enfermer dans de mauvaises stratégies d’investissement.
  • Vous ignorez des signaux d’alerte importants (par exemple, si un secteur devient risqué, mais que vous refusez d’y croire).

Comment y remédier ?

Faites un effort conscient pour considérer des points de vue opposés aux vôtres. Lisez des sources variées et confrontez les arguments. En finance, il est essentiel d’évaluer toutes les données, même celles qui vont à l’encontre de vos intuitions.

Le biais de disponibilité : l’influence des souvenirs récents

Si vous avez connu la crise financière de 2008 ou le krach du Covid-19 en 2020, vous vous souvenez sûrement avoir vu des gens perdre beaucoup d’argent en Bourse, ce qui vous a conforté dans l’idée que « le marché est trop risqué ». Résultat : vous préférez éviter totalement les actions et laissez dormir votre argent sur un livret d’épargne à 2.4 %.

De la même façon, vous avez vu que l’or ou le Bitcoin ont affiché des niveaux records récemment… mais aussi des replis assez brutaux, et cette volatilité ne vous inspire pas confiance.

Ce phénomène est dû au biais de disponibilité : notre cerveau accorde plus de poids aux événements récents ou marquants pour évaluer un risque, même si ces événements sont en réalité exceptionnels.

L’impact sur vos finances :

  • Vous évitez des placements potentiellement rentables à cause d’un événement passé.
  • Vous surestimez les risques en vous basant sur des anecdotes personnelles plutôt que sur des données statistiques solides.
  • Vous adoptez une vision court-termiste alors que l’investissement fonctionne mieux sur le long terme.

Comment contourner ce biais ?

Prenez du recul et appuyez-vous sur des données objectives. Oui, la Bourse peut connaître des crises, mais sur un horizon de 20 ou 30 ans, elle reste l’un des placements les plus performants. L’or aussi peut afficher des mouvements baissiers parfois, mais globalement, le prix du métal précieux n’a fait que croître depuis plusieurs décennies. Raisonner à long terme permet d’éviter de tomber dans le piège de la peur excessive.

Le biais du statu quo : la résistance au changement

Votre banque vous a proposé un contrat d’assurance-vie il y a dix ou quinze ans. Vous l’avez souscrit sans trop y réfléchir et, depuis, vous n’y avez plus touché. Pourtant, les rendements sont devenus médiocres et les frais élevés, mais vous hésitez à transférer votre épargne ailleurs. Après tout, « ça fonctionne » et « changer demande trop d’efforts« …

C’est le biais du statu quo en action. Notre cerveau déteste le changement et préfère conserver les habitudes, même lorsque des possibilités plus avantageuses existent.

Pourquoi c’est un piège ?

  • Vous laissez votre argent sur des produits peu performants par simple inertie.
  • Vous manquez des opportunités d’optimisation (frais moins élevés, meilleures performances).
  • Vous repoussez des décisions importantes comme renégocier votre prêt immobilier ou diversifier votre épargne.

Comment le surmonter ?

Faites régulièrement un audit de vos finances : quelles sont les alternatives plus pertinentes ? Est-ce que vos placements sont toujours adaptés à votre situation et à vos objectifs ? Ne laissez pas l’inertie dicter vos choix financiers.

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L’excès de confiance : se croire plus malin que le marché

Ça y est, vous avez lu le bouquin du dernier gourou financier à la mode, ou alors vous avez compilé toutes les données à votre disposition sur Internet, et vous êtes persuadé d’être désormais capable de repérer les bons plans en matière d’investissement. Cryptos, bourse, forex ou encore placements alternatifs, vous suivez tous les marchés de près et vous êtes convaincu que vous allez battre les indices avec votre stratégie d’investissement active.

Ce biais est l’un des plus dangereux pour les investisseurs : l’excès de confiance nous pousse à surestimer nos compétences en matière de finance.

Les conséquences ?

  • Vous prenez des risques inconsidérés, pensant que vous maîtrisez mieux le marché que les autres.
  • Vous faites trop de transactions, ce qui génère des frais importants et grignote vos gains.
  • Vous sous-estimez l’importance de la patience et du long terme dans l’investissement.

Comment éviter ce piège ?

Restez humble face aux marchés. Même les investisseurs professionnels peinent à battre les indices sur le long terme. Plutôt que d’essayer de « jouer » avec votre argent, privilégiez une approche disciplinée, comme l’investissement passif ou le DCA, avec une stratégie diversifiée.

Le biais attentionnel : se focaliser sur des détails insignifiants

Vous vérifiez chaque jour la valeur de vos placements, vous surveillez en permanence les variations du CAC 40 ou du Nasdaq, et vous paniquez au moindre repli de votre portefeuille.

Ce comportement est dû au biais attentionnel : notre cerveau a tendance à se focaliser sur certaines informations au détriment de l’ensemble. On s’attarde sur les fluctuations quotidiennes, oubliant que la performance d’un investissement s’évalue sur des années.

Quels sont les effets de ce biais ?

  • Vous prenez des décisions impulsives basées sur des variations à court terme.
  • Vous vous stressez inutilement et risquez de vendre trop tôt par peur d’une baisse passagère.
  • Vous perdez de vue votre stratégie globale d’investissement.

Comment y remédier ?

Apprenez à prendre du recul. Fixez une fréquence raisonnable pour analyser vos investissements (par exemple, une fois par trimestre). Évitez de vous exposer en permanence aux fluctuations boursières et restez focalisé sur vos objectifs à long terme.

Autres biais qui influencent votre épargne

La liste des biais cognitifs est encore longue et d’autres mécanismes psychologiques peuvent jouer contre vous :

  • Le biais d’ancrage : vous vous fiez trop à une première information, comme le prix d’achat d’une action, et refusez d’admettre qu’il faut peut-être vendre.
  • Le biais de représentativité : vous pensez que parce qu’un investissement a bien fonctionné dans le passé, il continuera forcément à être performant.
  • L’illusion de contrôle : vous croyez pouvoir prédire l’évolution des marchés alors qu’ils sont largement imprévisibles.

Prendre conscience de ces biais est la première étape pour améliorer vos décisions financières. Mais connaître ces pièges ne suffit pas toujours à les éviter. Vous devez rester vigilant, prendre du recul — quitte à remettre vos choix en question parfois —, vous former en continu et vous fixer, à la fois, des objectifs précis et des seuils à respecter pour éviter les décisions impulsives.

Évitez aussi la surinformation qui risque de vous donner une vision déformée de la réalité. Et surtout, ne laissez pas vos croyances saboter vos placements !