[Première publication – 17 septembre 2021]

En tant qu’épargnant avisé, vous savez déjà qu’il est essentiel de diversifier ses placements. Cela permet non seulement de minimiser le risque de moins-value toujours possible sur certains produits, mais aussi et surtout de préserver au maximum la valeur de votre patrimoine, ou plus précisément, son pouvoir d’achat. Dans ce cadre, l’or et l’argent s’imposent comme des instruments de choix, car leur vocation première est précisément de constituer des réserves de valeur presque totalement décorrélées des autres marchés.

Mais quelle proportion de capital faut-il consacrer à l’achat d’or ou d’argent, qu’il s’agisse de pièces ou de lingots ? Y a-t-il un ratio d’épargne minimum, ou au contraire maximum, à respecter ? En clair, combien doit-on avoir d’or et d’argent dans son portefeuille pour une assurance optimale contre les aléas économiques ?

Une épargne de précaution à long terme

L’or et l’argent sont des actifs refuges qui offrent une certaine sécurité par rapport aux autres produits de placement. En tant que métaux précieux, ils sont universels, ne dépendent d’aucun État ni d’aucune organisation spécifique, et leur valeur n’est pas liée à une devise particulière qui pourrait être dévaluée à tout moment. En gros, ils jouent le rôle d’assurance contre les crises politiques et économiques, ainsi que contre l’inflation susceptible d’affecter notre patrimoine.

Cependant, comme toute assurance, il convient de raisonner sur le long terme. Une épargne en or et en argent ne doit pas être appréhendée comme une épargne classique liquide, bien que la liquidité des métaux précieux soit particulièrement élevée. La conservation de valeur est réellement perceptible sur la durée, ce qui signifie qu’il vaut mieux réserver à l’achat d’or et d’argent une somme dont on n’aura pas besoin à court ou moyen terme. Investir dans une once d’or ou une pièce de 20 Francs Napoléon en tant que placement de long terme permet ainsi d’assurer une valeur tangible face aux imprévus.

Un placement de bon sens avant tout

En 1998, Gerald Perritt, un analyste financier de Wall Street, reprenait à son compte un adage de la Bourse de New York et conseillait de consacrer 5% de son capital à l’achat d’or, en priant pour que son prix ne monte jamais ! Aujourd’hui, la théorie aurait tendance à privilégier la proportion de 10%, mais le raisonnement reste le même : quand on sait ce qui peut faire grimper le cours de l’or (inflation, crise économique, troubles sociaux, guerre… ou encore pandémie mondiale !), alors un prix de l’or relativement stable, voire en léger repli par rapport aux devises internationales, c’est plutôt une bonne nouvelle. À commencer pour le reste de notre patrimoine (en théorie 90%) qui n’est pas investi en métaux précieux, car les supports traditionnels peuvent durement pâtir des mêmes évènements qui ont tendance à faire grimper le cours de l’or. Voir 10% de son capital s’apprécier tandis que les 90% restants s’écroulent, ce n’est jamais un très bon calcul.

Maintenir une part raisonnable de son patrimoine en métaux précieux, entre 5% et 10%, vous assure donc une certaine résilience face aux crises. Et ce, sans pénaliser votre capacité à modifier votre stratégie d’épargne dans le temps (si vous optez, par exemple, pour un profil plus patrimonial d’investisseur locatif, après des années à avoir majoritairement spéculé en bourse) ni votre sécurité financière en cas de baisse du marché des métaux précieux. Un usage de bon sens, donc, mais qui occulte un certain nombre de réalités pouvant nuancer la pertinence de ces fameux 10%.

Si le prix de l’or augmente fortement, c’est souvent un signe que l’économie globale traverse une période difficile. Cependant, il est important de ne pas tout miser sur ces actifs, car une forte concentration sur les métaux pourrait limiter la diversification nécessaire pour amortir les chocs économiques.

Bien distinguer l’or et l’argent

Lorsqu’on parle de placement en or, il est crucial d’inclure également l’argent, car seul le bimétallisme permet de bénéficier à la fois d’une forte résilience en cas de crise et d’un certain dynamisme le reste du temps. Pour cela, il faut également comprendre que l’or et l’argent sont très différents et nécessitent donc des approches bien distinctes.

En effet, si l’or est connu pour compenser les mouvements des autres marchés (en clair, il va fortement monter quand l’économie est en difficulté, et vice-versa), l’argent a, quant à lui, un comportement plus complexe pouvant se traduire par des fluctuations plus marquées, pour ne pas dire plus violentes, car influencées par beaucoup plus de paramètres que l’or.

Gardons à l’esprit que plus de 50% de la demande en argent provient de l’industrie, contre seulement 12% pour l’or. Moins contracyclique que l’or, l’argent métal bénéficie assez nettement des bienfaits de la croissance économique, notamment dans les domaines de pointe que sont l’électronique, la médecine, les énergies renouvelables ou encore les télécommunications dans lesquels il est devenu indispensable. L’argent métal va alors se comporter comme un actif traditionnel en suivant en partie les évolutions positives des marchés, en plus d’agir comme une valeur refuge en cas de crise.

Ce dynamisme vient donc idéalement compléter le côté parfois un peu conservateur de l’or. Mais c’est justement ce même dynamisme qui doit inciter l’épargnant à un minimum de prudence dans son allocation d’actifs métalliques. Classiquement, pour les investisseurs français il est conseillé d’avoir 75% d’or pour 25% d’argent afin de pondérer la plus grande variabilité de ce dernier.

Épargner suivant son profil et ses objectifs

La règle des 10% de métaux précieux dans son patrimoine doit être adaptée en fonction de son profil d’épargnant et de ses objectifs à moyen/long terme.

Par exemple, selon que l’on dispose de 5000 euros ou de 5 millions, un investissement de 10% en pièces d’or ou lingots d’argent ne représentera bien évidemment pas du tout la même somme : 500 euros seront sans doute insuffisants pour que la nature d’actif refuge des métaux précieux puisse s’exprimer réellement (une simple once d’or vaut au moins 4 fois plus cher), tandis que 500 000 euros constituent une couverture patrimoniale confortable contre les éventuelles crises à venir.

À l’inverse, 1000 ou 2000 euros d’or et d’argent pour un épargnant modeste sont certainement disproportionnés par rapport au reste de son capital pour lequel il devra plutôt privilégier une épargne immédiatement disponible et liquide, sur un livret par exemple (on parle d’un à trois mois de revenus minimum pour faire face à d’éventuelles dépenses imprévues, voire à une perte ponctuelle de rémunération pour les statuts les plus précaires). Seule exception, les détenteurs d’un compte VeraCash qui peuvent bénéficier des avantages d’une épargne en or liquide par l’intermédiaire de leur carte de paiement, et peuvent donc y consacrer une somme plus importante sans nuire à leur équilibre budgétaire.

En outre, on n’envisage pas de la même façon l’achat de métaux précieux, qui s’apparente à un placement de longue durée, selon que l’on est au début de sa vie professionnelle avec probablement l’envie d’acquérir sa résidence principale et de fonder un foyer (ce qui amplifie notre aversion naturelle au risque), ou que l’on arrive au contraire à un moment de sa vie où on a fini de payer sa maison, que les enfants sont déjà grands et que l’épargne accumulée au fil du temps nous permet de moins craindre d’éventuelles fins de mois difficiles. De même, si l’on a le projet de créer une entreprise ou d’investir dans l’immobilier par exemple, l’achat d’or et d’argent devra rester mesuré afin de ne pas amputer sa capacité à mobiliser des fonds propres pour ces projets.

Quelques exemples concrets de budget pour l’achat d’or et d’argent

En conclusion, un jeune actif pourrait allouer 5 à 10% de son épargne aux métaux précieux, en privilégiant des achats réguliers de pièces ou de petites barres d’or pour étaler le risque et lisser le coût d’achat. Un investisseur plus expérimenté avec une épargne conséquente pourrait consacrer jusqu’à 10 à 15% de son patrimoine en or et en argent, lui permettant non seulement de se constituer une réserve de valeur significative qui fera rempart à l’inflation, mais qui le dotera aussi d’une véritable épargne tampon pouvant absorber de potentielles turbulences économiques, sans trop impacter sa capacité d’investissement ni son capital directement disponible.

Enfin, au-delà de 20% d’épargne en métaux précieux, même si le patrimoine investi ailleurs demeure important, on s’approche dangereusement d’une zone de trop forte concentration de ses actifs. Dès lors, revendre une partie de son or ou de son argent dégagera de nouvelles liquidités permettant ensuite d’élargir ses horizons de placement et ainsi de mieux répartir le risque.

Ce qu’il faut savoir

  • En tant que métaux précieux universels, qui ne dépendent ni d’un État ni d’une monnaie, l’or et l’argent permettent une épargne de précaution à long terme.
  • Acheter de l’or ou de l’argent doit répondre à une logique de bon sens avant tout, et il faut comprendre que les cours de l’or et de l’argent répondent à des mécanismes différents l’un de l’autre et qu’ils nécessitent donc des approches bien distinctes.
  • Il faut également investir selon son profil et ses priorités d’épargne à court et moyen terme.
  • Entre 5% du patrimoine pour les plus prudents et 15-20% pour les plus aventureux, le budget alloué à l’achat d’or et d’argent ne doit pas faire oublier le principe de base qu’est la diversification.

Bruno GONZALVEZ

Auteur et consultant depuis plus de vingt ans dans le domaine de la communication stratégique, il a plusieurs fois travaillé pour le compte d'entreprises financières dont il décrypte aujourd'hui les coulisses et les mécanismes économiques de base à l'intention du plus grand nombre.