Certains gestionnaires d’actifs gèrent des sommes plus importantes que le PIB de la France. Ils investissent des dizaines de milliers de milliards de dollars pour leurs clients, et ont aussi des participations dans les plus grosses entreprises de la planète. La parole rare de leurs dirigeants peut faire basculer des secteurs économiques dans la dépression ou au contraire, la surchauffe. Qui sont ces géants de la finance ? Leurs décisions peuvent-elles impacter notre patrimoine et notre épargne ?
Les sociétés américaines de gestion d’actifs en tête des classements
Le monde compte une dizaine de géants qui représentent plus de 30 % de la gestion des actifs de la planète. Ce sont les monstres de « l’asset management ». La transparence de leur gouvernance et de leurs méthodes de gestion peut questionner.
8 américains dans les 10 premiers gestionnaires
Cette omniprésence de sociétés à la bannière étoilée dans les classements des sociétés d’asset management est-elle un problème ? Concentrons-nous sur les deux plus gros Américains et l’unique Français.
The Big BlackRock !
Le leader incontesté depuis plusieurs années, c’est la société BlackRock. Elle gère pour le compte de ses clients environ 10 000 milliards de dollars d’actifs ! Soit deux fois le PIB de la France. C’est environ 8 % du volume mondial !
Vanguard… à toi !
Moins connu, moins visible et donc moins décrié que le numéro 1, Vanguard n’en reste pas moins très important. Son portefeuille se limite à 8 200 milliards de dollars d’actifs en gestion… seulement ! Mais Vanguard est aussi un important actionnaire de BlackRock, avec plus de 8 % des actions du géant. S’il y en a un qui pourrait faire trembler le géant, c’est bien son proche confrère dont le siège social est perdu au milieu de la Pennsylvanie.
Et le Crédit Agricole sauve l’honneur
Il n’y a qu’un seul européen dans les premiers gestionnaires d’actifs mondiaux et il est français. Il s’agit d’Amundi dont la maison mère est le Crédit Agricole. Son volume d’actifs en gestion est toutefois 4 fois moins important que celui de BlackRock : 2 000 milliards de dollars, moins de 2 % du volume mondial.
Qui sont les clients des gestionnaires d’actifs ?
On va faire un peu de provocation, mais sans doute un peu tout le monde. En effet, si on prend une société comme BlackRock, ses clients sont en général des « zinzins », des investisseurs institutionnels. C’est-à-dire des assurances et des banques. Le rôle de BlackRock est de gérer des sommes pour le compte de ces investisseurs. Assurances et banques qui ont de leur côté la mission de placer l’épargne et le patrimoine de leurs clients : vous !
D’autres sociétés gèrent des fonds de pension, c’est-à-dire la retraite de certaines populations, aux États-Unis par exemple.
Où investissent ces entreprises de gestion d’actifs ?
Cela dépend des mandats que leur donnent leurs clients. Mais l’idée générale est quand même de permettre aux sommes placées de fructifier… tout en limitant les risques.
Les actions d’entreprises
Cela peut changer d’une société à l’autre mais, en prenant BlackRock comme référence, il est le leader alors il doit donner l’exemple. Plus de 50 % des actifs sont en actions, sur les marchés ou directement acquises auprès des entreprises. Par exemple, BlackRock possède plus de 5 % de Microsoft et d’Apple (l’équivalent de plus de 200 milliards chacun). Les Américains sont aussi un des plus gros actionnaires des sociétés du CAC 40. Récemment, ils ont pris 5 % dans le capital d’Atos.
Les obligations
Là aussi, les géants sont très présents. Ils investissent dans de nombreux fonds obligataires. Cela leur permet de maintenir des revenus si la bourse perd du terrain. C’était, jusqu’à l’augmentation des taux d’intérêt, une valeur sûre sur le long terme.
Les placements alternatifs
Ce n’est évidemment pas la majorité de leurs placements. Mais avec une telle force de frappe, les gestionnaires d’actifs ne vont pas laisser passer des placements potentiellement rémunérateurs. On a vu il y a quelques mois l’emblématique patron de BlackRock se passionner pour les Bitcoins, crypto-actifs qu’il adorait détester pourtant. L’explication était simple. La SEC (autorités de la finance aux États-Unis) allait autoriser la création d’ETF Bitcoins… et BlackRock voulait s’engouffrer dans la brèche. Alors adorer ce que l’on a détesté avant, c’est une couleuvre très facile à avaler du côté du Rocher Noir ! Tant que ça peut rapporter.
Les actifs de la planète entre les mains de quelques-uns : est-ce un problème ?
La réponse est dans la question. Évidemment, de telles sommes entre les mains de financiers privés, avec un contrôle public extrêmement limité, c’est un problème. La gouvernance de ces sociétés de gestion d’actifs est rarement transparente et, en tous les cas, très faiblement « bisounours ». C’est un euphémisme.
Leurs valeurs : celles de leurs investissements
Comme pour la finance durable, la limite pour un gestionnaire d’actifs est l’incidence sur ses investissements. Si le baril de pétrole augmente, les actions des sociétés pétrolières suivent la même tendance et sans doute leurs dividendes aussi. Dans un bureau de trading à NYC, Londres ou Paris, l’influence du pétrole sur le climat, et plus largement la planète, peut possiblement passer après les marges, les primes et les bénéfices potentiels.
L’influence sur les marchés
Bitcoin : la nouvelle coqueluche des gestionnaires d’actifs
On l’a vu avec le Bitcoin : le cours a commencé à grimper quand Larry Fink a commencé à s’exprimer favorablement sur le roi des crypto-actifs. Pour lui, le Bitcoin était trop volatil et n’avait pas d’existence réelle… jusqu’à que son potentiel de progression commence à réveiller l’appât du gain de l’investisseur. On retourne sa veste : le BTC, c’est bien. La décision favorable de la SEC pour la création d’un ETF BTC allait sans doute arriver. Le patron de BlackRock est influent.
Larry Fink n’aime pas l’or, contrairement à l’Inde
Le boss de la gestion d’actifs peut détester des produits. Récemment, dans une lettre à ses investisseurs, il a cité le cas de l’Inde qui se passionne depuis toujours pour l’or. Il a dénoncé un actif qui ne « sert pas l’économie ». Affirmant même que de l’argent laissé dans une banque permet le développement de l’économie, à l’inverse de l’or selon lui. Il a poursuivi en disant que l’or n’avait rien apporté à l’Inde.
Visiblement, les Indiens ne sont pas d’accord avec lui : ils continuent à acheter en masse de l’or, y compris la banque centrale de l’Inde. Le seul élément qui pourrait réduire la consommation d’or en Inde, c’est le prix de l’once !
Finalement, l’influence du CEO de Black Rock n’arrive pas à casser des comportements culturels d’un grand pays. L’or, une passion indienne plus forte que Larry Fink !
Ce qu’il faut retenir
- Les principales sociétés de gestion d’actifs sont américaines.
- BlackRock, le plus gros gestionnaire, tutoie les 10 000 milliards de dollars d’actifs en gestion.
- Les clients des gestionnaires sont en général des investisseurs institutionnels : banques et assurances. En bout de chaîne, il y a le petit épargnant.
- Les sociétés d’Asset Management peuvent essayer d’influencer un secteur ou un type d’investissement. Le plus gros a tenté de faire bouger l’or, il a perdu contre la passion indienne pour le métal jaune.
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