Bien que les BRICS partagent l’ambition de remodeler l’ordre mondial et de contester l’hégémonie du dollar, ils sont encore très loin d’aboutir…

Les BRICS : une alliance d’outsiders sur fond de désaccords

Le sommet des BRICS qui s’est tenu à Johannesburg du 22 au 24 août 2023 a mis en lumière la complexité et les défis auxquels est confronté ce groupe de pays émergents. Si l’élargissement du bloc a été au cœur des discussions, avec l’ajout prochain de six nouveaux membres (Argentine, Égypte, Iran, Éthiopie, Arabie saoudite et Émirats Arabes Unis), les BRICS sont surtout des outsiders. Ces pays, bien que représentant 42% de la population mondiale et 30% du PIB mondial, sont principalement unis par la volonté commune de contester l’hégémonie des États-Unis et de l’Union européenne sur la scène internationale.

Cependant, malgré cette ambition partagée — qui s’appuie davantage sur un rejet commun que sur un projet d’alliance forte —, de nombreux désaccords subsistent au sein du bloc, notamment en raison des différences politiques, économiques et géographiques entre ses membres.

En effet, les BRICS sont constitués de démocraties, de régimes autoritaires… et de tout ce qui se trouve entre les deux. Par exemple, l’Inde est la plus grande démocratie du monde, tandis que la Chine est gouvernée par un parti unique. De la même façon, certains membres des BRICS ont des différends frontaliers ou des tensions historiques comme l’Inde et la Chine, par exemple, ou encore l’Éthiopie et l’Égypte qui se chamaillent depuis une décennie autour d’un barrage sur le Nil. Sans compter que parmi les nouveaux arrivants, on trouve l’Iran et l’Arabie saoudite qui sont loin d’être les meilleurs amis du monde musulman.

La dédollarisation : un défi de taille

La principale volonté des BRICS est donc de se défaire de la dépendance au dollar. Là encore, un objectif ambitieux, mais semé d’embûches. Car chaque pays du bloc a sa propre politique économique. Par exemple, si des états comme la Chine et la Russie peuvent imposer des directives à leurs entreprises (et encore, Poutine a eu bien du mal à forcer les entreprises russes à renoncer au dollar au début de la guerre en Ukraine), d’autres, comme l’Inde et le Brésil, ont une approche plus libérale. Le dollar, en tant que monnaie de réserve mondiale, offre stabilité et confiance, et convaincre les entreprises de s’en éloigner ne sera pas une mince affaire.

D’autant que cette monnaie n’aura probablement que peu de lien avec l’économie réelle. Si elle devait voir le jour, cette monnaie ne serait ainsi pas utilisable par les particuliers, mais permettrait surtout à ces pays de mener leurs échanges commerciaux sans faire intervenir le dollar (à noter que la Russie négocie déjà en yuans avec la Chine) ; au mieux, une sorte d’unité de compte facilitant les échanges mutuels ou servant de base à un système de sécurisation des règlements, concurrent du système Swift des occidentaux.

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Valeur Refuge, c'est le podcast qui vous aide à comprendre l'économie. Pour ce cinquième numéro, avec une démographie record, une croissance insolente et un régime politique à part, la Chine vise le leadership mondial en matière d'économie. Pour réaliser son objectif, une cible : les États-Unis.

Une monnaie commune : un rêve lointain ?

L’idée d’une monnaie commune pour les BRICS, bien qu’intéressante sur le papier, semble donc être un rêve lointain. D’abord, on l’a dit, le groupe est extrêmement hétérogène. Mais surtout, la plupart de ces pays sont particulièrement souverainistes et il y a peu de chances qu’ils arrivent à se mettre d’accord sur qui commandera les autres. Et on devine déjà qu’avec son poids économique colossal (70% du PIB total du groupe), la Chine s’imposera comme le principal acteur dans la gestion d’une telle monnaie. Gageons que tous les autres pays, y compris les nouveaux arrivants, soient assez peu enclins à devenir des vassaux de la Chine.

L’expérience de l’euro montre que la mise en place d’une monnaie commune est un processus complexe, nécessitant une intégration économique et politique profonde. Un véritable défi, même pour une “coalition” géographiquement et politiquement unifiée comme la zone euro. Alors que penser d’un projet d’économie monétaire unifiée pour des pays dont les régimes politiques, fiscaux et économiques sont aussi différents ?

L’or : une base solide pour une monnaie commune ?

Enfin, certains voyaient déjà dans cette nouvelle “méta-devise” internationale l’occasion de redonner tout son poids monétaire à l’or. Mais utiliser le métal précieux comme sous-jacent d’une monnaie commune aux BRICS se heurte là encore à un problème de taille.

Bien que la Russie et la Chine aient augmenté leurs réserves d’or ces dernières années, la majorité de l’or détenu par les banques centrales est entre les mains des pays occidentaux. En effet, sur les quelque 34 000 tonnes actuellement stockés dans les coffres des banques centrales de la planète, les Etats-Unis, l’Allemagne, la France, l’Italie, la Suisse et le FMI en possèdent déjà 21 000 tonnes. Même en comptant les six nouveaux pays qui rejoindront le groupe en 2024, ainsi que la quarantaine de petits états qui soutiennent le projet, l’or des BRICS et consorts dépassera à peine les 6000 tonnes (un peu plus si on considère que les 2092 tonnes d’or détenues par la Chine sont sous-évaluées).

Par conséquent, avec de toute façon moins de 20% des réserves mondiales à leur disposition, créer une monnaie basée sur l’or ne changerait pas grand-chose au rapport de forces économiques qui oppose actuellement les BRICS aux pays occidentaux. Ce projet pourrait même renforcer la position des américains et des européens, ce qui serait finalement le contraire de l’objectif visé par les BRICS.

Même si, pour le moment, la monnaie adossée à l’or n’aboutit pas à l’échelle internationale, elle est le leitmotiv de VeraCash qui vous propose depuis plus de 10 ans une solution d’investissement et de paiement en métaux précieux 100% physiques. De quoi garder un temps d’avance et envisager sereinement l’avenir !


Bruno GONZALVEZ

Auteur et consultant depuis plus de vingt ans dans le domaine de la communication stratégique, il a plusieurs fois travaillé pour le compte d'entreprises financières dont il décrypte aujourd'hui les coulisses et les mécanismes économiques de base à l'intention du plus grand nombre.